Une autre histoire du l’avènement du califat (3)

by Reza
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SHAFAQNA –  Ce qui suit fait partie du livre La Question De L’Imamat, par Sayyed Mujtaba Musavi-Lari , sélectionné par SHAFAQNA.

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Le projet des Khazradji (1) fut rompu. Il y eut mêlée pour saluer Abu Bakr, et l’on faillit écraser Sa’d ibn Ubâda, gisant sur sa civière. Ses compagnons intervinrent pour le protéger des coups.

Omar dit: “Tuez-le! Que Dieu le tue!” Abdurrahman ibn Awf se leva pour dire: ” Ô Ansârs (2) ! Bien que vous ayez du mérite, il n’y a pas dans vos rangs, des hommes pareils à Abu Bakr, Omar et ‘Ali!” Al-Mudhir ibn al-Arqam répondit: ” Nous ne récusons pas le mérite de ceux que tu viens de nommer! Il y a parmi eux un homme qui ne serait contesté par personne, s’il demandait ce droit” (Il faisait allusion à ‘Ali ibn Abi Taleb) (3)

Un groupe d’Ansârs cria alors: ” Nous ne reconnaîtrons que ‘Ali! ” (4)

Omar relatant plus tard ce fait dira: ” Il y eut beaucoup de confusion; les voix s’élevèrent au point que je craignis la division. J’ai alors dit: “Ô Abu Bakr, tends ta main, que je te prête allégeance! ” (5)

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Abu Bakr tendit la main; Bachir ibn Sa’d précéda les autres et s’empressa de lui prêter serment, puis Omar, puis ce fut le tour des Muhâdjirouns, et puis celui des Ansârs. (6)

En ce moment Omar et Sa’d ibn Ubâda se querellèrent. Abu Bakr intervint pour apaiser la querelle.

Sa’d ibn Ubâda dit à ses compagnons; “Faites-moi sortir de cette place!” et ses compagnons l’emmenèrent chez lui!” (7) Abu Bakr fut ensuite accompagné jusqu’à la mosquée pour y recevoir l’allégeance générale.

‘Ali qui était encore occupé au service mortuaire du Prophète, entendit l’appel à la prière s’élever de la Mosquée du Prophète et demanda à son oncle al-Abbâs: “Que se passe-t-il?”

Et son oncle lui dit: ” C’est horrible ce qu’ils sont. en train de faire! Ne t’avais-je pas dit de tendre ta main afin que je te fasse serment d’allégeance?” Ibn Ishâq rapporte d’après Anâs ibn Mâlek ce qui suit:

“Le lendemain de son investiture dans la Saqîfa (le jour-même de la mort du Prophète, Abu Bakr prit place sur la chaire), Omar se leva et ordonnait que les hommes se lèvent et viennent prêter allégeance un à un à Abu Bakr. Après cette seconde cérémonie, les gens se rendirent auprès de la dépouille du Prophète. Cela se passait un mardi. On avait déposé le corps du Prophète sur son lit. Puis, par groupes successifs, les gens vinrent prononcer des prières sur lui. ” (8) Abu Bakr et Omar n’ont pas assisté à l’enterrement du Prophète. ” (9)

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‘Ali, Abu Dharr, al-Miqdâd, Selmâne, Talha, Zubayr, Hodheïfa ibn al-Yamâne, Ubayy ibn Ka’b et d’autres semblables, n’avaient pas pris part à la. réunion dans la Saqîfa. Parmiles Muhâdijirouns, il n’y avait qu’Abu Bakr, Omar et Abu Obeyda, et quelques autres selon certaines traditions:

N’était-il pas nécessaire qu’on appelle les grandes personnalités présentes à Médine pour participer à la réunion, et entendre leurs avis sur cette question fondamentale?

Etait-il normal de considérer que cette réunion qui excluait les compagnons les plus éminentes pouvait siéger validement et décider du destin des musulmans?

Il est évident que l’investiture d’Abu Bakr fut improvisée, hâtive, et par conséquent forcée, puisqu’on ne donna pas le temps aux hommes -Présents ou absents- d’approfondir leurs réflexions, et de choisir en toute clarté.

C’est ce qui fera dire à Omar plus tard: ” L’investiture d’Abu Bakr fut une erreur. Dieu nous a préservé de ses mauvaises conséquences… Si plus tard quelqu’un vous invite à prendre une telle décision et agir de la sorte, tuez-le.” (10)

Cela dit, la désignation du deuxième calife par le premier, nous montre que la thèse de la désignation du calife par élection, après la mort du Prophète, était sans fondement. Aucun texte prophétique n’en atteste la validité. S’il en était autrement, on n’aurait pas suggéré au premier calife de désigner lui-même nommément son successeur, afin d’épargner à la communauté les vagues de la sédition et de la corruption, après sa mort. (11)

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Abu Bakr lui-même avait dit: ” Si Abu Obeyda était encore vivant, il aurait été le plus qualifié pour cette charge, car j’ai entendu le Prophète dire à son sujet: ” Il est le garant de cette Communauté! ” et si Sâlem, le maître d’Abu Hodheï fa était vivant, il aurait lui aussi été le plus qualifié pour cela, car j’ai entendu le Prophète dire à son propos: ” Il est un ami de Dieu! “ (12)

Comment ont-ils pu dire alors que l’Envoyé de Dieu n’a choisi personne comme son successeur avant sa mort?

D’autre part, le choix du troisième calife, n’avait pas été fait conformément à une règle coranique ou prophétique, et ne s’appuyait pas non plus sur la “vox populi”; et s’il appartenait au calife de désigner de son vivant, son successeur, pourquoi a-t-il délégué cette charge à un Conseil de six personnes?

Si le choix de l’imam était un droit de la communauté, en vertu de quel argument religieux, le deuxième calife lui a-t-il enlevé ce droit?

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Plus encore, devrait-il se permettre de remettre ce droit dans les mains des six personnes qu’il avait choisis lui-même et qui ne pouvaient par conséquent pas être les représentants du peuple?

Le Coran n’ordonne-t-il pas au Prophète même de consulter ses Compagnons? (13)


  1. Aws (arabe: اوس) et Khazraj (arabe: خزرج), sont les deux tribus arabes importantes du Yémen, qui ont émigré à Médine bien avant l’islam. Après l’émigration du prophète à Médine, ils ont été nommés Ansar (les assistants). Le rôle de ces deux tribus est important dans l’histoire de l’islam, en particulier dans l’hijra et les batailles. Certains historiens pensent que certains des versets du Coran ont été révélés à propos d’Ansar.
  2. Muhadjir ou muhâjir (arabe : مهاجر, émigrants, exilés, réfugiés) au pluriel muhâjirûn (مهاجرون). Les muhâjirûn désigne les premiers convertis à l’islam, les conseillers et les parents du Prophète Mahomet, qui ont émigré avec lui de La Mecque à Yathrib (Médine), événement connu sous le nom de l’Hégire. Les premiers musulmans de Médine s’appellent les Ansar (« aideurs »). Muhâjirûn est un mot arabe communément utilisé dans le monde musulman pour désigner quelqu’un qui a émigré d’un endroit à un autre.
  3. Al-Ya’qûbi: Târikh tome 2, p. 103.
  4. Tabari: Târikh tome 3, p. 208.
  5. Ibn Hichâm: Sîrat tome4, p.336; Ibn Kathîr: Târikh tome 5, p.246.
  6. Ibn Qoteyba: al.lmaat wal-Siyassat tome 2, p.9.
  7. Tabari: Târikh tome 2, p.455 à 459.
  8. Ibn Hichâm: S î rat tome 4, p.343; voir aussi: Riyâz al-Nazara tome 1, p. 164.
  9. Voir: Kanz.ul- Ummâl tome 3, p. 140.
  10. Ibn Hichâm: Sîrat tome 4, p.308; Ibn Kathîr et Tabari rapportent également cette parole de Omar (chacun dans son Târikh).
  11. Ibn Qoteyba: al-Iamat wal-Siyassat tome 2, p. 19.
  12. Voir à ce sujet: Le Târikh de Tabari et Ie Kamel de ibn Athîr.
  13. Voir le Coran, sourate âle ‘Emrân, verset 159.

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