SHAFAQNA– La validité des hadiths confirmant Ali (AS) comme calife et Imam est incontestable. Mais la question demeure : Pourquoi Ali (AS), le successeur légitime du Prophète (P), est-il resté silencieux après la mort de ce dernier et n’a fait aucune tentative pour faire valoir ses droits ? Pourquoi n’a-t-il pas réveillé la société de son sommeil ?
La réponse est que l’Imam Ali (AS) n’a jamais hésité à réclamer ses droits et qu’il a toujours rappelé aux gens la place légitime des Ahl al-Bayt du Prophète (P) en tant que successeurs, mais il n’a jamais tenté de reprendre ses droits par la force.
Dans les paragraphes suivants, nous examinerons les rapports historiques à ce sujet.
Comment l’Imam (AS) a réclamé ses droits dans différentes situations ?
Lorsque le Commandeur des Croyants (Amir al-Muʿminin) Ali (AS), fut informé de la querelle entre les Muhajirun et les Ansar à Saqifah, et aussi de leur vantardise d’eux-mêmes, il demanda : « Quel était l’argument des Ansar ? » Ils répondirent : « Puisque nous avons hébergé le Prophète (P), un chef sera choisi parmi les Ansar et un parmi les Muhajirun. » L’Imam (AS) dit : « Si le chef devait être choisi parmi les Ansar, pourquoi le Prophète (P) nous a-t-il alors exhorté à être gentils envers les Ansar qui étaient justes, intègres et miséricordieux envers ceux d’entre eux qui étaient pécheurs ? »
Un homme demanda à l’Imam (AS) : « Comment cette déclaration indique-t-elle que le leadership n’appartient pas aux Ansar ? » Il répondit : « Si le leadership était leur devoir, il n’y aurait aucun besoin de nous conseiller de les traiter avec gentillesse, puisque ceux au pouvoir n’ont pas besoin de gentillesse. »
Ensuite, l’Imam (AS) demanda : « Quel était l’argument de Quraysh ? » Ils rapportèrent que les membres de Quraysh disaient qu’ils appartenaient à la tribu du Prophète (P). L’Imam (AS) commenta : « Ils ont pris l’arbre et laissé le fruit. » (Nahj al-Balagha, Sermon N° 67)
Dans Nahj al-Balagha Sharif Al-Radhi cite l’Imam Ali (AS) comme composant les lignes de poésie suivantes en réaction à la position des Qurayshites :
Vous dites avoir pris le pouvoir par l’intermédiaire d’un conseil,
Mais les membres du conseil étaient tous absents.
Et si vous avez eu recours à la parenté et conquis le pouvoir,
Alors, il y en a d’autres plus proches du Prophète (P) que vous. (Aphorisme 190)
Peu de temps après Saqifah, ils amenèrent Ali, de force, à la mosquée pour lui faire prêter serment d’allégeance, mais il résista à leur demande et dit : « J’ai plus de droit au califat que vous. La bonne chose à faire est que vous me prêtiez serment de loyauté. Vous avez arraché le pouvoir et le califat des mains des Ansar en prétendant être les proches du Prophète (P) mais maintenant vous privez sa famille de leur droit au califat ! »
À lire aussi: L’histoire de Saqifah et la nomination de califes telles que décrites dans l’Histoire de l’Islam
Étonnamment, lors de ce rassemblement, c’était ʿOmar ibn al-Khattab qui demanda à Ali (AS) de prêter allégeance et dit : « Je ne te lâcherai pas tant que tu n’auras pas prêté serment. » Pourtant, l’Imam (AS), qui, grâce à la connaissance divine, était au courant de l’avenir de cet homme, révéla à travers un proverbe, le véritable motif d’Omar ibn al-Khattab de son insistance : « Tu ne trais une vache que si au moins, la moitié de celle-ci doit être la tienne ! »
Abu ʿUbayda ibn al-Jarrah employa un ton plus modéré. Il se tourna vers Ali et dit : « Cousin ! Tu es jeune, mais ce sont les aînés de cette communauté ; tu n’es pas aussi expérimenté qu’eux. C’est pourquoi je considère Abu Bakr comme le plus apte à assumer l’autorité sur les musulmans. Laisse-le devenir calife ! Dans le futur, si tu es en vie, tu seras plus digne et qualifié que n’importe qui d’autre, car personne ne doute de ta sagesse, de ta vertu, de ton éminence et de ta parenté avec le Prophète (P). » En réponse à Abu ʿUbayda, l’Imam (AS) dit : « Le successeur du Prophète (P) doit avoir toutes les qualités que vous venez de mentionner, mais le calife choisi à Saqifah en manque :
- La connaissance du Coran
- La connaissance des lois religieuses
- La bonne connaissance de la Sunna du Prophète (P)
- La bonne connaissance des affaires et des questions sociales
- Le désir d’éradiquer la corruption et les actes répréhensibles de la société
- La répartition équitable des richesses publiques
Je ne vois pas ces qualités dans le calife actuel pour lui prêter serment ; Je les vois plutôt en moi-même. » (Al-Imama was-Siyasa, 1/11-12)
ʿAmr ibn Wathila dit : « J’étais en train d’écouter à l’extérieur de la maison où le Conseil des Six avait été formé, quand j’ai entendu Ali dire : “Je vais vous fournir un argument si convaincant que ni les Arabes ni les non-Arabes ne pourront le réfuter.” Puis, il dit : “Y a-t-il quelqu’un parmi vous qui a cru à l’Islam plus tôt que moi ? ” Tous dirent : ” Non! ” Ali (AS) poursuivit : “Y a-t-il quelqu’un parmi vous à propos de qui le Prophète (P) a dit quelque chose comme ceci : ” Et celui dont je suis le maître, voici Ali est son maître. Ô Dieu ! Sois l’ami de celui qui lui vouera son amitié, et sois l’ennemi de celui qui lui déclarera son inimitié? ” Encore une fois, ils répondirent tous : ” Non”. » (Al-Sawaʿiq, 75)
En l’an 35/656, l’Imam Ali (AS) accepta la position de calife comme un devoir religieux. Ce jour-là, l’Imam dit en présence des compagnons du Prophète (P) : « Qui parmi vous a entendu cette phrase à Ghadir Khumm : “Et celui dont je suis le maître, voici Ali est son maître. Ô Dieu! Sois l’ami de celui qui lui vouera son amitié, et sois l’ennemi de celui qui lui déclarera son inimitié ?” » Certains d’entre eux, dont Abu Ayyub al-Ansari, Sahl ibn Hanif, Khuzayma ibn Thabit, ʿAbd Allah ibn Thabit al-Ansari, se levèrent et dirent : « Nous avons entendu ce qui vient d’être dit. » (Usd al-Ghaba, 3/307 et 5/205)
Le raisonnement et les arguments de l’Imam (AS) concernant sa légitimité ne sont pas limités aux cas mentionnés ci-dessus, au contraire, il rompait son silence et proclamait la vérité à plusieurs reprises.
Après la mort du Prophète (P), sa fille Fatimah (SA), ses fils Hassan (AS) et Hussein (AS), et même ʿAbd Aallah ibn Jaʿfar, et ʿAmmar ibn Yasir ont confirmé la légitimité d’Ali (AS) sur la base de ce qui s’était passé à Ghadir. Il est intéressant de noter que lorsque la relation entre Muʿawiya et ʿAmr ibn al-As s’est détériorée, ce dernier a souligné dans une ode louant plusieurs des nobles caractéristiques d’Ali (AS), sa nomination par le Prophète (P) comme son successeur à Ghadir Khumm. (Voir, Al-Ghadir, 2/159 et suivants)
En réalité, ceux qui nouent des amitiés et des alliances basées sur des intérêts matériels voient, en cas de désaccord, leurs liens d’amitié et leur unité brisés. En conséquence, ʿAmr ibn al-As dans son ode révèle que c’est une réalité. Par conséquent, les arguments qu’il a déployés pour la légitimité d’Ali (AS) sont révélateurs du fait qu’Ali (AS) et ses descendants n’ont jamais cessé d’essayer de protéger les droits du peuple et de le guider vers le droit chemin.
Ce texte est traduit par shafaqna Français
Source : Sobhani Ayatollah Jaʿfar, Islam chiites : Histoire et doctrines, Chapitre 8